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Le Liban, 30 ans après la déchirure : Perspectives, Rétrospectives et Prospectives

2005-04-28

 

Institut MEDEA Et L’Union Chrétien Démocrate – CDI

« Le Liban, 30 ans après la déchirure : Perspectives, Rétrospectives et Prospectives »

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Belgique – 28 avril 2005

Chers amis,

C’est vrai que ce n’est pas très commode de communiquer par téléphone, mais je compte sur votre indulgence pour pouvoir suivre un bref commentaire sur les perspectives d’avenir du pays des cèdres après plus de 35 ans de guerres sur notre territoire.

Effectivement, la guerre a réellement débuté en 1969 avec les premiers affrontements entre l’armée libanaise et les forces palestiniennes qui cherchaient à réaliser chez des bases permanentes à partir desquelles elles (les forces palestiniennes) pouvaient attaquer Israël. C'est-à-dire la HANOISATION du Liban. A la suite de ces affrontements, des accords iniques nous ont été imposés comme prix d’une hypothétique paix interne (ce sont les accords du Caire de novembre 1969, sous l’égide du célèbre Président égyptien de l’époque, Jamal Abdel Nasser). Depuis, une succession d’enclaves, de quasi souverainetés, d’occupations, etc… se sont installées en territoire libanais, provoquant chez nous guerres, chaos, désolation et surtout des drames humains en termes de morts, d’enlèvements et de vexations de toutes sortes. Le tout avec la complicité de la communauté internationale sous la pure logique de la Realpolitik.

A un moment, notamment, durant mon mandat en 1982, le Liban était sous occupations multiples. Il nous fallait lutter contre l’armée israélienne, l’OLP, l’armée syrienne, les Pasdarans iraniens et une horde d’organisations de diverses tendances communautaires, fondamentalistes ou idéologiques, toutes prônant la violence politique comme moyen de réaliser leurs objectifs au Liban, mais surtout ailleurs.

Dans les années 90, la Syrie prenait le dessus manu militari sur la majorité de ces forces et nous imposait par le feu et le sang sa propre dictature.

Il a fallu le 11 septembre 2001 et la guerre d’Iraq, afin que les grandes puissances prennent conscience de la nécessité de libérer le Liban.

C’est alors qu’en 2005, trois facteurs ont aidé à la libération du Liban et ouverts la voie à la restauration de la souveraineté, de la démocratie et de la liberté.

Ces 3 facteurs sont :

L’érosion de l’influence syrienne au Liban et notamment de leurs instruments libanais rongés par la corruption.L’unité des libanais, cette unité a commencé à s’exprimer ouvertement depuis l’an 200 avec la libération du sud et le retrait de l’armée israélienne et qui a culminé avec l’assassinat du Premier ministre Rafic Hariri. Un homme fédérateur, généreux et respecté de tous. Cet assassinat a déchaîné les passions anti-syriennes et fut l’occasion pour tous de clamer Haut et Fort leur Ras le bol…La solidarité internationale avec la cause du Liban, notamment, grâce à l’action des Présidents Bush et Chirac qui ont déclenché une action internationale vis-à-vis du Liban qui a culminé par 2 résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU :

La 1559 - Retrait Syrien

- Désarmement de toutes les milices

- Déploiement de l’armée libanaise sur la frontière libanaise avec Israël

La 1595 _____ Constituant une commission d’enquête afin de déterminer les responsabilités dans l’assassinat de Rafic Hariri.

Voilà, et au moment où je vous parle, nous sommes au jour J + 2 de la libération du territoire libanais du dernier soldat et officier de renseignements syriens du Liban.

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De nouveaux horizons s’offrent au Liban à partir de cette libération du territoire.

Nous inaugurions une nouvelle ère. C’est la première fois depuis longtemps que les libanais sont maîtres de leur destin. Nous en avons conscience.

Plus d’un million de jeunes, de toutes les confessions et tendances politiques ont manifesté, Place des Martyrs, à Beyrouth et ont fait le serment de rebâtir leur pays sur de nouvelles bases. De détruire les anciens clivages confessionnels et sociaux… Ceci est essentiel et laisse espérer un avenir meilleur… Les jeunes sont notre espoir… Ils ont montré qu’ils étaient prêts à relever les défis de l’histoire… Ils ont surpassés les partis et les mouvements politiques traditionnels, même souvent de l’intérieur de ces mêmes partis.

Pour terminer, quels sont les défis qui nous attendent ?

Sur le terrain, persistent des enclaves qui échappent à l’autorité de l’Etat, contrôlées par le Hezbollah allié des syriens et des iraniens, et armées jusqu’aux dents ; soit par certaines organisations palestiniennes qui bénéficient de la présence en territoire libanais de plusieurs centaines de milliers réfugiés palestiniens. Toutes ces enclaves offrent un refuge à tous les mouvements terroristes ou à des hordes de hors la loi, ou aussi aux agents syriens restés sur place…Ce problème des enclaves en territoire libanais devrait être traité par le gouvernement d’union nationale issu des prochaines élections législatives au mois de mai prochain. Il nous faudra à tout prix rechercher une solution à ce problème qui puisse satisfaire les impératifs de la souveraineté nationale et la sécurité du citoyen qui n’accepte que la seule protection et l’autorité des forces officielles libanaises. Ces élections législatives seront décisives et les plus importantes de notre histoire. Car, elles vont donner naissance à un parlement qui va déterminer en toute liberté (ce que j’espère en tout cas) la géographie politique du pays et donc de déterminer aussi les grandes options nationales. Les dernières élections libres ont eu lieu en 1972. Les autres, depuis 1990, sous la haute protection et le contrôle implacable de la Syrie… Et Damas a pu donc faire main basse sur toutes nos institutions nationales constitutionnelles, politiques et syndicales… Ce fut la mise au pas de toute la classe politique… et ceux qui ne se pliaient pas, étaient soit assassinés (B.G., R.M., K.J…) ou emprisonnés (S.G. et bien d’autres) ou forcés à l’exil (A.G. et M.A.)

C’est l’occasion pour nous de rebâtir nos institutions sur de nouvelles bases… de suivre la voie de la modernité et d’emboîter le pas à la globalisation ; mais une globalisation à visage humain. C’est ceci le rôle du Liban.

4 Dynamiser l’économie et réactiver les projets sociaux, deux facteurs indispensables pour assurer l’avenir de nos jeunes qui émigrent de plus en plus faute de perspectives d’avenir dans leur propre pays. Nous devons à ces jeunes la « Intifada » de l’indépendance, cette grande révolte pacifique et démocratique.

L’occupant a instauré chez nous la logique du clientélisme en système de gouvernement, et la corruption comme instrument pour se constituer une base politique. Le résultat fut catastrophique. (A) sur la nature de la citoyenneté aux horizons bloqués et (B) sur l’économie elle-même qui, régulée par la loi de la jungle a généré 40 milliards de $ dollars de dette publique pour un pays d’à peu près 4 millions d’habitants.

Chers amis,

Voilà par quoi le Liban est passé, voilà les défis qui nous attendent. Nous les affrontons avec Foi et Détermination.

Ce qui nous reste, c’est votre appui. La Belgique a toujours été à nos côtés. Elle nous a toujours bien compris. Elle sera toujours à l’écoute du Liban. !

Merci